Lil Uzi Vert, la rockstar du rap

L'ère post-Obama rap n'a qu'à bien se tenir.

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Image droits réservés - Lil Uzi Vert

Philly a su ramener un bon lot d’artistes dans le rap jeu, mais c’est surtout pendant la fin des années nonante et début du 21ème siècle que l’ancienne brève capitale des États-Unis, a connu une grande flopée de MC’s talentueux sortir de la ruche pennsylvanienne. Avec une dynamique énergique, un côté aussi glacial que peut laisser paraître Chris Evans dans Snowpiercer et leur flow souvent tranchant, des rappeurs comme Beanie Sigel, Freeway ou Vinnie Paz (même si ce dernier a vu le jour en Sicile) ont su imposer le rap de Philadelphia sur la mappe-monde du rap. Si l’on grimpe encore plus haut dans l’arbre rapologique de Philly, on retrouve notre très cher Fresh (Old?) Prince de Bel Air qu’est Will Smith et son acolyte de l’époque, DJ Jazzy Jeff. Bref, une ribambelle d’artistes qui ont su faire exploser le rap de leur région à un niveau national à peu près au même moment où Allen Iverson et ses Sixers ont connu les plus grandes gloires du basket de la ville.

Retour dans le temps présent, les Sixers pataugent et sont la risée de la NBA tout comme Meek Mill qui est un des seuls artistes actuels ayant percé en dehors de la région avant de recevoir une des plus grandes claques monumentales actuelles lors de son diss contre Drake. Ce dernier ayant été désigné vainqueur par knock-out. Et comme par coïncidence, au moment où le petit copain de Nicki Minaj perd toute sa crédibilité et se fait ridiculiser par un des mastodontes du rap, un nouveau produit sorti tout droit de Philly commence à sortir la tête de l’eau : Lil Uzi Vert. Tout d’abord en se faisant un gros spot marketing en apparaissant sur le hit de 2015, WDYW aux côtés de A$AP Ferg et Rich The Kid. Le monde entier découvre alors un petit gabarit muni d’une coiffure atypique semblable à un palmier rose. Sur ce morceau. Uzi se prête particulièrement à un refrain plus efficace en utilisant sa voix aiguë poussée à la fois entre un cri forcé mais aussi désespéré. C’est peut être les deux adjectifs qui qualifiaient bien la ville de Philadelphia jusque-là, mais ce petit palmier attirant les rayons de soleil risque bien de faire les beaux jours de sa ville en la remettant sur les rails de la carte rap.

Leader de la nouvelle génération

Ensuite, c’est en décembre 2015 que Symere Woods, de son vrai nom, sort Luv Is Rage, une mixtape de douze titres un peu bordélique mais qui va permettre au jeune loup de Philly de collectionner, déjà, un bon nombre de hits. Et c’est là que l’on découvre que le rappeur n’a rien à voir avec ses prédécesseurs. Entre un flow quasi inexistant, des couplets syncopés et des gimmicks très basiques qui deviennent très rapidement une nouvelle sorte de rime, d’où son fameux « Yeah » qui se trouve souvent à chaque fin de phrase, Lil Uzi Vert défie toute les lois constitutionnelles de sa ville. En effet, il se positionne en véritable leader de la New School qui casse complètement les codes du rap qui sont depuis quelques années omis par plusieurs artistes. En déplaise aux conservateurs du genre, le rap n’a fait que d’évoluer, années par années, et c’est ce renouvellement régulier qui lui permet de survivre et d’être toujours au top. Avec des titres comme Yamborghini Dream, Top ou Banned From TV, Lil Uzi commence gentiment à construire sa renommée.

Plutôt rockstar

On vous l’avait prédit, il figurait en début d’année dans la liste des rappeurs à suivre et, bien entendu, le rappeur est  déjà souvent évoqué parmi les plus grands artisans rap de cette cuvée 2016. Prolifique, charismatique mais aussi au cœur du sujet de plusieurs controverses, Lil Uzi Vert ne se considère pas rappeur mais plutôt rockstar. Pire, en août dernier, dans un interview avec The Fader, il se proclamait comme « la première rockstar de l’ère post-obama rap ». Il ne le cache pas, lorsqu’on lui demande ses plus grandes influences, aucun MC old-school n’est cité et Marylin Manson figure parmi sa liste. Pour couronner le tout, lorsque l’artiste a récemment été invité sur Hot 97, la plus grande station radio basée sur le rap, il lui a été demandé de lâcher quelques freestyles sur un beat nineties de DJ Premier. En vain, la nouvelle rockstar du rap a totalement refusé de rapper sur du old-school en expliquant que « ni lui et ni ses fans aiment ce genre de musique ». Quelques heures plus tard, la nouvelle a fait jaser tout l’univers rap qui se divisait entre partisans du phénomène et ses détracteurs.

Son monde est en L.U.V.

Logiquement, un bon rappeur est censé pouvoir lâcher des couplets sur n’importe quelle mélodie. Alors cette question s’est vite retournée envers un Uzi qui s’est montré totalement indifférent à cette vague de critiques, et il n’a pas tout tort. Possédant déjà une grosse fan base capable de le poursuivre furieusement en plein festival au point de le tacler et le mettre à terre, Lil Uzi compte également deux projets à son actif en 2016, Lil Uzi Vert vs The World et le tout récent The Perfect LUV Tape. Hymnes au succès et très festifs, ses morceaux sont pour la plupart mélodieux et souvent accompagnés par des kits typiques de la trap. Mais contrairement à ce genre, le rappeur (ou rockstar) sait se démarquer des autres en donnant plus de vie à des instrumentales déjà riches en sonorités. Refrains chantés, gimmicks poussées jusqu’à l’exaspération, diversité et changements réguliers de tons tout en déployant un flow très loin d’être technique, Symere Woods a trouvé sa propre marque, sa propre formule et elle fonctionne plutôt très bien. Ses projets s’avèrent être très dithyrambiques et des morceaux comme le fameux Ps & Qs qui contient une production basée sur un riff magique d’accordéons ou encore Ronda (Winners) qui englobe une vibe exotique digne des Caraïbes font de lui un artiste talentueux certes, mais à part.

Figure de Rapchat

En dehors de la musique, le rappeur peut aussi raconter ses propres histoires et pensées divertissantes, faut le dire, à travers ses textes. Sur le très bon Erase Your Social, extrait de son dernier opus, il fait parler ses dires à propos des réseaux sociaux et de la raison pour laquelle il n’a pas Snapchat. Très loin du niveau conscient des rappeurs d’aujourd’hui comme Kendrick Lamar ou Lupe Fiasco, le jeune auteur sait se distinguer avec des sujets basiques mais divertissants (Do What I Want).

Régulièrement en compagnie de Maaly Raw et Don Cannon, ses producteurs attitrés qui forment une cohésion parfaite avec l’artiste, il sait aussi attirer des grands noms du circuit. En effet, on retrouve Future sur Seven Million, l’un de ses morceaux les plus connus mais des collaborations ont aussi été effectuées avec Young Thug, Playboy Carti ou Offset (l’un des membres du trio qu’est Migos).

Le comble de l’histoire, c’est que le Lil Uzi Vert a récemment co-signé un deal chez DreamChasers Records, maison de disque appartenant à… Meek Mill. Deal fructueux ou pas, une chose est sûre, Lil Uzi Vert a les cartes en main pour s’asseoir sur le trône du rap game d’ici quelques mois, rockstar ou pas.