Interview | Pascal Greggory

"Pour être sincère, je n'aime pas beaucoup me voir à l'écran."

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Pascal Greggory (Henry Munro) - Image droits réservés - © Canal +

Pascal Greggory, c’est une carrière colossale qui compte plus de 50 films, de nombreux passages à la télévision et plus de 20 pièces au théâtre. Hormis sa carrière, Pascal Greggory se pose comme un homme réfléchi, au phrasé contrôlé. Perçu comme un acteur « intellectuel », omniprésent dans l’univers pointu du cinéma d’auteur français, Greggory interprète Henry Munro, l’un des personnages centraux dans cette nouvelle création estampillée Canal +.

Propos recueillis par Sven Papaux

Pouvez-vous me définir le personnage que vous campez dans Section Zéro ?



Pascal Greggory – C’est un personnage qu’on peut adorer ou détester, ça c’est sûr. C’est le salaud de l’histoire, le côté sombre de l’histoire. C’est un homme de pouvoir, un idéologue, le patron de la Section Zéro.

Vous tenez une part prépondérante dans l’histoire ?



PG – C’est un rôle très important dans l’histoire, l’homme que Sirius (ndlr : Ola Rapace) combat. C’est un combat entre Sirius et Munro.

Je voulais rebondir sur le fait que vous êtes classé comme un acteur « intellectuel ». Vous avez tourné avec les grands tels qu’André Téchiné, Eric Rohmer, Patrice Chéreau ou encore Olivier Dahan. Comment en êtes-vous arrivé à tourner avec un réalisateur comme Olivier Marchal, qui est plus adepte des oeuvres plus musclées ?



PG – C’est vrai que j’ai tourné dans le cinéma dit d’auteur. Par contre, j’ai fait des films populaires (ndlr : Arsène Lupin, La Môme, Nid de guêpes). C’est vrai que c’est plus marquant dans ma carrière, mon travail dans des films d’auteur. Ce sont des films peut-être plus intéressants dans une filmographie, même si ce sont des films moins populaires dans le cinéma français. À mon avis, Olivier Marchal a une énorme admiration pour Patrice Chéreau. Le cinéma de Chéreau, le théâtre de Chéreau. Je pense qu’il était assez impressionné du travail que j’avais accompli avec Chéreau. Je me suis tout de suite bien entendu avec lui, j’ai compris cet homme, j’ai aimé cet homme, j’ai aimé sa manière d’être, sa manière de penser. C’est pour ça que j’ai de suite accepté le rôle qu’il m’avait proposé.

« Olivier Marchal a une énorme admiration pour Patrice Chéreau. »

Vous ne prenez pas mal cette étiquette qu’on vous donne ?

PG – Non, pas du tout. Je suis un acteur comme des millions d’acteurs. Je fais mon boulot. Je vais vous dire un truc, on ne peut pas travailler avec des cons. À partir du moment que quelqu’un est intelligent, on y va. C’est du boulot, on y va et on découvre de nouvelles choses. Je ne suis absolument pas sectaire.

« on ne peut pas travailler avec des cons. À partir du moment que quelqu’un est intelligent, on y va. »

Voyez-vous une différence entre un réalisateur tel qu’André Téchiné et Olivier Marchal ?

PG – Tout d’abord, il y a une différence entre les tournages pour le cinéma et les tournages pour la télévision. La différence ne se trouve pas dans l’aspect financier, mais se trouve dans le temps que nous avons à disposition. Vous me direz que le temps c’est de l’argent. (Rires) L’approche est totalement différente par rapport au cinéma. Le temps de travail est différent. On prend moins le temps, on fait 2-3 prises maximum, alors qu’au cinéma on en fait 10-15. Avec Jacques Doillon, on peut en faire 20. Quand on tourne à la télévision, c’est 4 prises au grand maximum. Ce qui est difficile, c’est de canaliser cette énergie dans ce laps de temps donné. Quand on est acteur, il faut être très en forme.

S’il fallait être en forme, c’est-à-dire que le tournage fut difficile ?



PG – Non, c’était pas plus difficile qu’autre chose. Seulement, c’est difficile de partir loin de chez-soi. La Bulgarie (ndlr : le lieu de tournage de Section Zéro) est très différente de la France. Il y a une adaptation à faire, un mode de vie où il faut s’adapter aux coutumes.

Si nous prenons le synopsis de Section Zéro, pensez-vous qu’un tel scénario est possible dans les années venir ?



PG – J’en sais rien. Qu’en pensez-vous ?

Quand on voit ce qu’il se passe en ce moment, on peut affirmer que le monde ne va pas très bien.



PG – C’est sûr que le monde est en ébullition. C’est loin d’être paisible en ce moment. En fait, on verra après les élections américaines. Si Trump gagne, alors là c’est le chaos. (Rires) Si les gens sont un minimum sensés, Trump ne passera pas.

Avez-vous d’autres projets pour la suite de votre carrière ?



PG – En ce moment, je travaille sur un projet pour M6. Le projet s’intitule Glacé, que j’ai débuté il y a un mois avec Charles Berling. En même temps, je tourne un film belge qui se nomme Méprise de Bernard Declercq. Après, j’ai un projet de théâtre avec Vanessa Paradis.

Vous accordez encore beaucoup de temps au théâtre ?



PG – Oui, j’aime beaucoup le théâtre. Pas plus que le cinéma, c’est pareil. Le théâtre me convient, je retrouve une certaine racine ancienne de cet art qu’est la comédie. Pour ainsi dire, au cinéma je n’ai pas peur. Par contre, au théâtre je retrouve le trac et la peur.

« Le théâtre me convient, je retrouve une certaine racine ancienne de cet art qu’est la comédie. »

Même avec une expérience comme la vôtre ?



PG – Ce n’est pas une histoire d’expérience. Plus on vieillit, plus on a le trac.

Dernière question, je voulais juste avoir votre avis sur le résultat final de Section Zéro. Je sais qu’en tant qu’acteur, le sentiment est très différent du plateau au résultat final.

PG – Je n’ai rien vu. Pour être sincère, je n’aime pas beaucoup me voir à l’écran. Pour moi, c’est du passé. Il y a pas mal de films que j’ai fait, que je n’ai jamais vu. Pour tout vous dire, ça ne m’intéresse pas beaucoup. C’est bizarre, hein!

Je peux tout à fait comprendre que vous ne vouliez pas vous voir. Beaucoup de personnalités peinent à se voir à l’écran.

PG – C’est troublant. Nous voyons les défauts que nous avons, nous voyons aussi ce que nous aurions pu faire de mieux. Beaucoup de choses frustrantes que vous ne pouvez pas changer.

Section Zéro | Bande-annonce