For Noise 15 | Interview: Klaus Joahnn Grobe

Cette année, lors du For Noise, le Billet s'est intéressé à la scène suisse et aux groupes qui montent. On vous propose donc une série de 4 entretiens...

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Klaus Joahnn Grobe / Tous droits réservés

Ils sont deux, ils sont beaux, ils sont Zurichois et nous les avons rencontrés avant leur excellent concert au For Noise…

Klaus Johann Grobe, lorsque j’entends votre nom, j’imagine un vieux type des 70’s, avec un pullover, alors qu’en fait vous êtes un groupe de jeunes. D’où vient ce nom ? Est-ce un vieil oncle à vous, particulièrement cool ?

On ne sait jamais, il y a peut-être un oncle dont on n’a jamais entendu parler. Non, en fait, comme tu l’as dit, c’est quelque chose qu’on aime, qu’on entende le nom et qu’on imagine quelque chose, une personne. Certains imaginent un écrivain, un pianiste d’hôtel et c’est en fait un nom qu’on aime bien et ce n’est pas très clair de qui ou de quoi il s’agit. Pour certaines raisons, le nom porte une sorte de sentiment rétro et donc quand les gens l’entendent, ils l’associent avec les 70’s le plus souvent, ce qui est un effet secondaire sympa. Mais nous sommes venus simplement avec ça en jonglant entre différents noms et ça a donné ce personnage fictionnel. Donc pas de grande histoire, ça peut être un vieux type des 70’s, un Allemand ou quelque chose comme ça, mais on n’a pas écrit une biographie sur lui. On avait ça en tête, on n’en a jamais vraiment parlé.

Vous chantez en allemand. À une époque où même les groupes français chantent en anglais, ou l’entier de la scène suisse chante en anglais. Est-ce un souhait spécifique de votre part? Est-ce que c’est problématique quand vous jouez à l’étranger ou ici en Suisse Romande ?

Je crois que c’est juste arrivé comme ça, on a commencé avec la musique et quand on chante en allemand, ça marche juste pas mal avec le style de musique qu’on fait. Ça serait étrange de chanter en anglais avec ce type de musique peut-être. On pourrait peut-être essayer, mais aujourd’hui ça sonnerait faux pour être honnête. Si on avait commencé en anglais, on dirait peut-être autre chose, je ne sais pas. On n’y a pas vraiment réfléchi.

Au début, c’était plutôt un énorme avantage, spécialement au Royaume-Uni, où les gens semblaient vraiment nous aimer aussi parce que nous chantions en allemand, parce que visiblement cela semblait vraiment authentique (rire). Genre « regarde il y a ce groupe suisse qui chante vraiment en allemand ». C’était assez étrange au début, mais aujourd’hui ça semble plus simple à l’étranger qu’en Suisse. Ici les gens semblent avoir un peu peur de ça.

Quand je lis des articles sur vous, il y a un mot qui revient toujours, c’est cette histoire de krautrock (ils finissent la phrase avec moi). Ce terme se réfère autant à de la musique naze des 70’s qu’à Kraftwerk, cela signifie presque tout. Vous vous voyez là-dedans et si oui qu’est-ce que ça veut dire Krautrock aujourd’hui, en 2015 ?

Comme tu le dis, le terme Krautrock est souvent mal utilisé, il n’a même pas été inventé par les gens qui le jouaient, c’est un terme inventé par un journaliste. Pour moi, ce qui est vraiment important et ce qui est vraiment Krautrock, dans les premiers groupes, c’était pour eux de trouver leur propre identité et d’essayer de faire un truc neuf sans trop s’occuper de ce qui se passait d’autre. Si tu prends ça, aujourd’hui, peut-être que je me sens un peu connecté à ce truc, parce que si on n’a pas essayé de faire un truc nouveau, ce qu’on a fait c’est de ne pas vraiment s’occuper de ce qui se passait autour, ni de ce que les gens penseraient de notre musique. Nous voulions juste faire ce qui nous plaisait, ce qu’on trouvait important et ce qui nous allait bien, notamment avec nos capacités. Toi (en parlant au clavier), tu es plus expérimenté au clavier, mais nous ne sommes pas des musiciens super entraînés et nous ne sommes que 3 sur scènes, nous avons donc voulu réduire le truc au maximum et essayer d’être honnêtes et faire un truc qui nous va. C’est donc en ça que le terme Krautrock nous correspond,  cette volonté d’honnêteté.

Les différents points dont on vient de parler, le nom, la langue, le style, sont des choses qui vous connectent avec un sentiment rétro/nostalgique. Est-ce quelque chose dans lequel vous vous reconnaissez ou simplement un effet secondaire de votre musique ? Votre musique est-elle nostalgique ?

On écoute de la musique des 60’s aux 80’s et donc ce qu’on fait est connecté à cette période. On n’a pas parlé entre nous de faire de la musique qui sonne exactement comme à cette époque, c’est juste que cette époque est celle qui nous influence le plus. Ça s’est juste fait naturellement, sans qu’on y pense.

Si vous deviez donner une influence, comme ça ? Je sais c’est une question débile, mais bon…

Oh c’est difficile à dire, on écoute tellement de groupes différents, mais un mec qui revient toujours est Manfred Krugg, d’Allemagne de l’Est. Il est aussi acteur et il a fait des disques incroyables qui nous correspondent bien d’une certaine façon.

Cette tendance rétro, ce revival d’anciens sons, on retrouve ça partout, depuis Franz Ferdinand il y a 10 ans, et c’est vrai qu’on le sent un peu dans votre musique. Vous en pensez quoi ?

C’est vrai que lorsque tu parlais de nostalgie, on remarque que dans les 60’s et les 70’s, les gens n’étaient pas capables de faire « tout » comme aujourd’hui. Je veux dire que s’il y avait 5 types sur scènes, il y avait 5 instruments et ils jouaient 5 instruments. C’est ce qu’on aime faire aussi, on aime réduire le truc à ce qu’on sait faire avec nos mains. C’est possible avec un ordi de créer une énorme superposition de couches, ce qui est OK, très bien, mais on aime jouer la musique aussi honnêtement qu’on peut. Ce que tu vois, c’est ce que tu entends. Aujourd’hui, tu as souvent cet énorme mur de son, avec des couches et des samples de rythme, ça sonne toujours comme un orchestre. C’est très cool aussi, mais ce n’est pas ce qu’on fait.

Dernière question : vous faites des concerts partout maintenant, vous explosez, c’est quoi le concert le plus bizarre que vous ayez fait ?

Une fois on a été invité pour un atelier artistique et on jouait sur une scène très haute, très proche du plafond et on avait des casques pour ne pas se cogner, c’était étrange de jouer comme ça. Il y a aussi eu un nez cassé une fois, la police est venue aussi, les trucs normaux finalement.