L’homosexualité est un sujet encore tabou en Corée du Sud. Faire un film sur une chorale gay n’était donc pas un choix anodin pour Lee Dong-ha qui présentait son film Weekends au Festival Black Movie en janvier dernier. A travers des portraits touchants, le réalisateur donne la parole à des hommes qui, pour la première fois, peuvent exprimer leurs émotions, parler de leur sexualité mais aussi de leur répression. Dans une société encore très religieuse, les protagonistes du film et membres de la chorale G-Voice, chantent leurs histoires.
Propos recueillis par Sarah Imsand
Pourquoi avoir choisi de faire un film sur l’homosexualité ?
En Corée en ce moment, il y a beaucoup de communautés homosexuelles. Mais cela reste un sujet tabou pour les médias et le cinéma. Je voulais faire ce documentaire pour montrer que cette communauté est présente dans le quotidien de tous en Corée, leur permettre de dire « on est comme tout le monde, on a notre vie ». J’ai vu les membres du chœur G-Voice et j’ai essayé d’être le plus libre possible dans mes choix, je voulais montrer un sujet tabou à travers des personnalités chaleureuses et diversifiées. Dans le documentaire, l’un des membres meurt. Cet événement m’a fait réaliser que j’avais peu de temps pour médiatiser ce problème entre la communauté gay et les homophobes.
Quelles ont été les plus grosses difficultés que vous avez rencontrées ?
La chose la plus difficile était de trouver des gens d’accord d’être filmés car en Corée cela demande beaucoup de courage. Au départ sur les 40 chanteurs de G-Voice, il n’y en avait que trois ou quatre qui étaient d’accord d’être filmés, mais ils voulaient être anonymes.
Dans le film, les protagonistes parlent très librement de leur sexualité, comment avez-vous fait pour instaurer un tel rapport d’intimité ?
Cela m’a pris quatre ans pour persuader les membres d’être interviewé. Au début, ils ne me faisaient pas confiance et ne comprenaient pas mes intentions. En passant beaucoup de temps avec eux, ils ont compris que mon intention était de combattre cette situation critique en Corée. Ce qu’on voit dans le documentaire, c’est des témoignages qui ont été fait très récemment.
Quelle est actuellement la situation par rapport à l’homophobie en Corée ?
Il est très difficile d’être homosexuel aujourd’hui en Corée. A l’école déjà, puis sur leur lieu de travail, ils sont régulièrement discriminés. Quelques membres de G-Voice ont créé un refuge pour les jeunes qui font leur coming out. Leurs parents n’acceptent souvent pas que leur fils soit gay. Les droits humains des homosexuels ne sont pas respectés. Par exemple chaque fois que la troupe veut organiser un concert ou un événement public, des partisans politiques ou religieux exercent toujours beaucoup de pression sur eux.
Est-ce que le film a été vu en Corée du Sud et quelles ont été les réactions ?
Oui, le film est sorti dans les salles, malheureusement pas en grand public. Il y a eu plusieurs réactions positives. Plusieurs personnes homosexuelles ont pu, après le visionnement de ce film, en parler à leurs proches, dont plusieurs membres de G-Voice qui ont fait leur coming out à travers ce film.
Le film utilise les codes de la comédie musicale, pourquoi ?
Dans ce film ce n’était pas juste le sujet qui était l’élément principal mais aussi les paroles chantées par le groupe qui décrivent leurs vies, leurs émotions et les difficultés auxquelles ils étaient confrontés. Les chansons sont très importantes, c’est pour ça que j’ai choisi d’utiliser la comédie musicale. Pour les protagonistes, c’était aussi une manière de s’amuser et représenter tout ce qu’ils ressentaient, même si c’est une situation et un sujet très lourd en Corée.
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