Alors que la grande majorité du web s’excite sur les dernières galettes sorties par Frank Ocean, beaucoup d’autres projets séduisants voient brièvement la lumière dû à l’exposition médiatique qu’attire le dernier Boys Don’t Cry. Rebelle comme je suis, je n’ai pas encore écouté son dernier projet (marre de ces exclus hors-Spotify). J’ai donc occupé mon temps libre autrement et vite trouvé un prétendant qui pourrait déloger Franck l’océan : Tory Lanez.
En vadrouille au niveau des singles et lâchant quelques projets gratuits par-ci, par-là, le second joyau du Canada a bien vagabondé avant d’atteindre le sommet. Cette semaine, il a enfin sorti dans les bacs I Told You, son premier album studio officiel qui raconte de A à Z ses périples dramatiques. Dans une ambiance rétro R’n’B nineties qui se fait de plus en plus rare, le chanteur et emcee (à ses heures perdues) nous offre un album autobiographique et donc très introspectif qui relate ses débuts les plus miteux jusqu’à son ascension vers la gloire.
Construit autour de 14 morceaux, le projet contient également 14 interludes qui servent d’introduction et de ligne directrice chronologique tout au long de l’opus. Même s’il peut s’avérer très rigide et structuré, le projet de Tory Lanez compte beaucoup de narration et de story-telling dans ses morceaux, mais le problème c’est qu’il le fait bien, et l’immersion dans le monde de Daystar (son vrai prénom prémonitoire) est aussi rapide qu’accessible. Honnête, empoignant et très profond, l’album est l’illustration parfaite d’un journal intime resté secret jusqu’à maintenant. On y découvre les tournants de sa vie, ses moments mémorables et quelques fois tragiques.
Dans To D.R.E.A.M. l’artiste fait preuve de son aisance à effectuer une transition entre couplet rappé et refrain chanté, le tout agrémenté de boucles de piano de son producteur attitré Play Picasso, le Noah « 40 » Shebib du pauvre, diront-ils. En effet, dans une humeur plus sombre et inspirée que son pire ennemi qu’est Drake, le jeune canadien prouve que son ascension au sommet n’a rien à envier au chef de file des hiboux. Par exemple, vu que l’égo est de mise, Tory Lanez démontre sur 4am Flex, qu’il sait lui aussi jouer au dur en nous récitant une histoire de lui et un ami cambriolant une maison. D’ailleurs, comme démontré sur le deuxième couplet du morceau (qui doit être le meilleur passage de l’album), le tournant final est inespéré et fini dramatiquement pour son compère.
De l’autre côté, des morceaux comme Guns And Roses, Cold Hard Love et le très poignant Question Is démontrent le talent du chanteur à poser ses cordes vocales perçantes et envoutantes sur des ambiances hypnotiques qui se rapprochent d’un style des années nonante remis au gout du jour. Ses multiples périples chez sa dulcinée qui lui servait plutôt d’hébergement intérimaire avant de trouver la voie officielle y sont souvent racontés.
La fin de l’album est un passage direct au Tory Lanez actuel. On assiste à l’appel intéressé d’un cadre de chez Interscope, sa signature officielle chez le label qui donnent ensuite vie à ses deux plus grands singles jusque-là : Say It et LUV. La consécration finale.
Complet et agréablement bien poli, son premier opus est une réussite en général. Mis à part ses singles, on retiendra avant-tout des morceaux comme Dirty Money ou Loners Blvd qui transpire la franchise du bonhomme. Également doué dans la narration et dans ses refrains accrocheurs, Tory Lanez n’a, en aucun moment, douté de sa réussite dans l’industrie musicale et le prouve avec fierté et véhémence envers ses contradicteurs sur I Told You (admirez le petit clin d’oeil), oui il nous l’avait bien dit.