Directement à la sortie de La Belle Saison, même bien des jours après l’avoir vu pour la première fois, un sentiment distinct de confusion persiste dans votre esprit. Cela n’a rien à voir avec la qualité du film en soi, bien au contraire! La seule certitude que l’on puisse avoir est celle que l’on vient de visionner un très bon film. La confusion émane du fait qu’on ne puisse pas distinguer ce qui rend l’œuvre particulièrement grande tant son ensemble d’acteurs, de thèmes et de la réalisation est homogène.
Dans le Paris des années 1970, La Belle Saison nous plonge dans la vie d’un groupe de jeunes femmes, féministes plus ou moins selon les goûts de chacun. Mai 68 est passé, mais la révolution sociale en France n’a pas pour autant cessé. Les femmes sont toujours discriminées, et ce petit groupe commence à s’engager activement dans les démonstrations et les manifestations concernant les thèmes tels que l’avortement ou le salaire des femmes. Mené par Carole (Cécile de France), le groupe accueille dans ses rangs Delphine (Izïa Higelin), une jeune paysanne qui a quitté la campagne pour la ville. L’amitié qui les lie prendra rapidement des dimensions plus importantes.
Jusqu’à l’apparition à l’écran de la date à laquelle le film se déroule, on peut facilement imaginer que les premières scènes se passent de nos jours. Apres un début lourd et poussif, le temps passe vite dans le cinéma et les actions, bien que décousues, ont un fil conducteur et restent toujours amusantes. Un point que j’ai particulièrement admiré est la musique, propice au tempo et un grand éventail de la radio de l’époque.
Parsemé d’esprit, de paroles raffinées, d’un vocabulaire riche et de débats vifs (parfois à la française où tout le monde se crie dessus en même temps), La Belle Saison est indéniablement propulsé dans la sphère des tout bons films grâce à la complicité de Cécile de France et d’Izïa Higelin. Cette relation qui s’installe entre les deux actrices et, par extension, leurs personnages transcende les limites personnelles et sociales de l’époque. Cette passion, cet amour affiché devant Manuel (Benjamin Bellecour, qui à chacune de ses apparitions provoque des scènes magistrales), le compagnon de Carole, mais caché devant Monique (Noémie Lvovsky), la mère de Delphine, catalyse tous les actes et focalise le film sur une relation humaine plutôt qu’une lutte sociale.
Vu à travers les yeux de Delphine la majorité du temps, La Belle Saison nous propose une belle dose de drame, d’amour, de sérieux et de sexe. Un équilibre subtil entre l’édifiant et le frivole, le permis et l’interdit, notamment vis-à-vis du regard des gens. Dans son petit village, Delphine se doit de préserver le statu quo, car ce sont les valeurs que sa famille lui a inculquées, ainsi que les mœurs et les valeurs de sa région.
La censure est en fait le thème du film. Que ce soit la censure des idées, la censure du corps, la censure des libertés. La censure de l’amour ou la censure du comportement, La Belle Saison nous parle d’un temps dans la vie de Carole et Delphine où plus rien n’est interdit. Voilà à mon avis la beauté de leur temps ensemble.
Un film mature et abouti, La Belle Saison, comme le personnage de Delphine, dévie de ses intentions, ou du moins des intentions annoncées. Cela devait être un film à propos de jeunes femmes, déterminées, brillantes, fortes, luttant pour leurs droits contre l’institution. Cela devint bien plus simple que cela, mais bien davantage parlant. Le film raconte les aléas de la vie que l’on ne peut rarement changer, mais que l’on doit naviguer et embrasser. Et comme ce voyage est beau.
Noté : 4.5 / 5
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Bande-Annonce
Casting
Cécile de France
Izïa Higelin
Noémie Lvovsky
Jean-Henri Compère
Loulou Hanssen
Kévin Azaïs
Benjamin Bellecour
Lætitia Dosch
Sarah Suco
Calypso Valois
Nathalie Beder
Bruno Podalydès
Détails
Date de sortie en Suisse: 19.08.2015
Réalisateur: Catherine Corsini
Pays de production: France / Belgique
Durée du film: 105 minutes
Genre: Drame
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