Radiohead aux Nuits de Fourvière

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Thom Yorke faisant l'amour à son micro / Loll Willem / Tous droits réservés

Hier soir Radiohead était à l’honneur pour l’ouverture de la 71ème édition des Nuits de Fourvière, un festival pluridisciplinaire se déroulant dans le lieu mythique et antique du Théâtre Gallo romain de Lyon durant juin/ juillet. Un concert en plein air dans un espace plutôt intimiste quand on connait la renommée du groupe.

Après des années d’absence sur scène et un nouvel album « A Moon Shaped Pool » le groupe Britannique était extrêmement attendu; autant dire que pour chopper des places il fallait se lever tôt ou hypothéquer sa maison pour se procurer un billet au marché noir, les prix allant jusque 800€ ! On se souviendra aussi des 1500 personnes venues dès 9h00 du matin place Bellecour pour dégoter leur ticket d’or.

N’ayant pas pu obtenir de place à temps, j’ai tenté l’option de la dernière chance,  celle que m’avait secrètement conseillé un pote : assister au concert à partir du parking en hauteur adjacent au théâtre. Me voilà donc en route vers 18h00, tabouret à la main, arpentant la colline de Fourvière pour rejoindre l’arrière du théâtre où déjà, de nombreux fans, malins ou fauchés, étaient sur place. On repère les habitués venus en camionnette pour se hisser sur le haut du toit, d’autres ont des escabeaux et des cordes pour se suspendre tout confort. On s’amuse à admirer l’imagination des gens, trouvant n’importe quel stratagème pour apercevoir un bout du concert. L’ambiance est bonne, on boit des bières, commande pizza, l’un joue de la gratte pendant que le théâtre se rempli petit à petit sous le rythme percutant d’une musique d’ambiance qui nous fait languir de plus en plus.

Une installation simple mais efficace
Une installation simple mais efficace. @ Anaïs Bréda

La scène est déjà prête, les instru’ sont posés comme dans une salle de répète, deux batteries, un piano, un synthé, quelques grattes, des fils de partout, six écrans posés à la verticale en fond, quelques machines à fumée, pas de chichi, le concert promet d’être pur et authentique. 

20H c’est Holly Herndon qui ouvre le bal sans qu’on s’y attende. Deux nanas débarquent sur scène, Holly la jeune rousse américaine et sa copine la blonde qui plus tard fera office de chœur et de danseuse expérimentale. Elles s’installent toutes deux autour d’un table  et Holly balance le son en tapant sur la touche « enter » de son Macintosh. Y ressort une musique étrange faite de sonorités mi techno, mi acoustiques, mi lyriques, carrément futuristes; à se demander si Holly ne vient pas d’une autre planète tant sa musique est hors norme. Son acolyte l’accompagne au chant tantôt murmuré, tantôt saccadé créant une atmosphère étrange et prenante à la fois. Le public semble intrigué et un peu perdu face à ces rythmes déstructurés qu’il semble difficile à capter. C’est alors que la blonde se met en scène, comme pour apporter un peu d’action, elle danse, gémit parfois, comme pour réveiller les gens. Après 40 minutes de show, je suis mitigée, l’univers et intéressant mais un peu trop flou pour moi.

 

 

Vue de la scène, derrière les barreaux @Anaïs Bréda
Vue de la scène, derrière les barreaux @Anaïs Bréda

20h 45 Le public est impatient, les uns crient, les autres sifflent, la foule s’excite dans une énergie très positive et pour nous, c’est pareil, on est là, on attend, on se languit, s’accrochant à cette grille qui nous sépare du théâtre. Au loin, le ciel est gris/noir et on aperçoit les lumières de la ville qui s’allument petit à petit comme pour combler de magie ce ciel ténébreux sans étoile.

21h15 Radiohead arrive enfin ! Les musicos s’installent gentiment et Thom Yorke débarque en petite foulée sous une pluie d’applaudissements digne de l’acclamation d’un dieu romain. Le public est en délire et on entend les premières notes de Burn the Witch, le dernier petit bijou du groupe, dans une version beaucoup plus rock and roll. Les lumières rouges sang fusent, contrastant avec le vert environnant, la scène est magnifique à voir, le son est excellemment bon.

Après cette première mise en bouche énergisante, retour au calme, la musique est douce, bleue, on aperçoit sur les écrans du fond, une mise en abîme poétique des musiciens jouant sur scène, se fondant les uns dans les autres, l’image est vaporeuse telle la beauté d’une bougie partant en fumée. L’atmosphère est lunaire, signature de leur dernier album. Les musiques s’enchainent à une vitesse folle tant l’instant et bon et intense. A chaque chanson, Thom change d’instrument, passant du synthé au piano, de la guitare acoustique à l’électrique. Radiohead nous fait voyager d’un univers à un autre en un instant. Aussi bien qu’en deux heures le public et moi sommes plongés dans des mondes différents, à la fois lunaires, psychédéliques et même matrixiens sous le jeu des lumières vertes qui nous perdent dans l’espace temps.  Thom est plein d’énergie, il danse en trans’ tel un gourou agitant ses maracas sous l’admiration de la foule hypnotisée par le spectacle.  La première partie sera ponctuée de nombreux nouveaux morceaux et se terminera tout en douceur sous l’hypnotique Climbing up the Wall.

La magie des lumières, @Anaïs Bréda
La magie des lumières, @Anaïs Bréda

 

Quelques minutes plus tard, le groupe remonte sur scène en jouant la carte des valeurs sures avec de grands classiques : Exit music et Paranoid Android, entre autres. L’énergie est bonne, le public confortablement installé se lève (enfin) et chante sur les refrains qu’il connait par cœur.

Il est 23h, la deuxième partie a filé encore plus vite que la première, le groupe nous quitte en nous remerciant avec quelques mots de français et on espère qu’une chose : qu’ils reviennent pour nous émerveiller de nouveau.

Les légendes se font attendre sous les cris d’un public déjà en manque de sa dose de musique. Après 10 minutes interminables cette fois-ci, c’est dans la pénombre que le groupe nous rejoint, plus de bleu, de vert ou de rouge, les écrans sont éteints et seul le public est éclairé d’une lumière douce et tamisée. Nous apercevons à peine les musiciens qui jouent en toute simplicité, sans superflu préférant mettre en avant son auditoire, et sa marche !

Le concert se terminera par la très poignante « You and Whose Army » qui j’en suis sure à tiré la larme à l’œil à plus d’un.

Un concert éblouissant, plein d’émotions, tout en équilibre pour certains, mais qui valait la peine d’être vécu. A peine redescendu sur terre, on plane encore et remercie le festival, de nous avoir laissé la chance d’entrevoir ce concert de façon clandestine. Pour le prochain concert, c’est clair, je m’y prendrais à l’avance pour admirer de près ce groupe mythique qui nous a prouver une fois de plus qu’il était l’un des plus grands.

Anaïs Bréda