Dernièrement, la romance entre Robert Pattinson et Reese Witherspoon (Water for Elephants) nous avait exposé la dureté et la précarité du monde du cirque. Le reflet d’une vie d’itinérant pas toujours facile à endurer. Dans Chocolat, nous découvrons un autre aspect dans le monde du spectacle : le racisme. Monsieur Chocolat est tout simplement le premier clown noir a se produire sur la scène artistique française. Il forme un duo avec George Footit, un clown populaire dont l’heure de gloire semble être passée. Avec Footit, Chocolat accèdera au sommet de la société, mais le succès populaire use un homme.
De l’anonymat à la gloire. L’argent facile. Les femmes. L’ascension fulgurante du clown Chocolat (Omar Sy) la doit à l’audace de George Footit (James Thierrée). Footit aperçoit Chocolat dans le petit cirque Delvaux et voit en lui un potentiel certain, alors qu’il joue les gros durs pour impressionner les foules. Le processus lancé, les deux acolytes débutent la confection du numéro qu’ils vont proposer. Arrive le moment fatidique…et la sauce ne prend pas avant que Chocolat ne croise le regard d’une petite fille dans le public. C’est le moment choisi par Footit pour mettre un coup de pied dans le postérieur de Chocolat. Le déclic d’une collaboration couronnée de succès débute à cet instant…
La popularité ne cesse de grimper, et voilà le duo qui déferle sur Paris, à la Belle époque. Même à Paris, le succès ne cesse de croître. L’argent coule à flot et Chocolat goûte volontiers à cette nouvelle vie pleine de richesse. Mais ce succès a un prix, celui de passer pour un souffre-douleur devant les milliers de gens à chaque représentation et chaque soir. À la longue, Rafael Padilla – le vrai nom de Chocolat – commence à fatiguer de prendre des coups tous les soirs. Considérablement marqué par le racisme qui règne à cette époque, et les regards inquisiteurs quand il accompagne une femme de la haute société, le clown noir commence à douter de sa collaboration avec George Footit. Les nouvelles résolutions de Chocolat sonneront la révolte et le glas de ce duo hors du commun. Les divergences pleuvent et la rébellion est imminente.
Le racisme, sujet central du métrage, n’est pas autant pompeux qu’on pourrait le croire. Non, car derrière cette success-story, la relation entre les deux protagonistes est l’aspect le plus captivant. Certes, nous constatons la jalousie et les grognements de la société de l’époque – un sujet récurrent pour l’époque – face à l’enrichissement d’un clown noir, mais ce duo artistique s’apparente à un renouveau et un pas (timide) face au multiculturalisme d’antan.
À la réalisation, Roschdy Zem met un point d’honneur à capturer cette relation entre les deux protagonistes. Très pointilleux sur le travail des lumières et des couleurs – une lumière épurée qui rappelle Marguerite, le film de Xavier Giannoli -, Zem propose un travail abouti. L’acteur-réalisateur, qui remet le couvert après son dernier film Bodybuilder, tente de décrypter une relation entre deux caractères bien distincts. Zem laisse une marge de manœuvre conséquente à Thierrée et Sy pour porter et s’approprier l’histoire. Ô surprise, Thierrée, de par son charisme et sa voix basse, délivre une prestation de grande classe. Le petit-fils de Charlie Chaplin campe sobrement et avec intelligence George Footit, bien entendu aidé par son passé dans le monde du cirque. Les techniques et les rudiments du métier sont explorés avec finesse, comme la performance de Omar Sy. Entraîné dans la spirale de Thierrée, Omar Sy compose l’un de ses rôles les plus poignants. Très adroit dans ses numéros de clown, le comédien français réussit à transmettre cette douleur profonde qui caractérise son personnage. En somme, un duo détonnant !
De par cette amitié forte et les aléas du duo artistique, Chocolat se concentre principalement sur la complexité relationnelle des deux protagonistes. Zem se focalise tellement sur cette relation, que les répétitions sont légion et l’impression de tourner en rond se fait (vite) sentir.
Inspiré du livre de Gérard Noiriel (Chocolat clown nègre. L’histoire oubliée du premier artiste noir de la scène française), l’oeuvre de Roschdy Zem ne déchaîne pas les passions mais mérite un certain coup d’oeil.
Bande-annonce :
Fiche technique :
Réalisé par : Roschdy Zem
Date de sortie : 3 février 2016
Durée : 1h50min
Genre : Biopic, Drame
Nationalité : Français
Scénario : Cyril Gely, Gérard Noiriel
Photographie : Thomas Letellier
Musique : Gabriel Yared
Distribution Suisse : Ascot Elite
Casting :
Omar Sy
James Thierrée
Clotilde Hesme
Olivier Gourmet
Frédéric Pierrot
Noémie Lvovsky
Olivier Rabourdin
Alice de Lencquesaing