Coup de projecteur : Objectif Sauvage

Nous vous parlons ce soir d'un projet incroyable réalisé par trois jeunes Romands!

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Photo © Cedrik Strahm

Dans cet entretien, nous partons à la rencontre de trois passionnés d’images et d’aventures de la région, qui sont en train de créer un film inédit.

Objectif Sauvage est le nom du projet somptueux de Cedrik, Josh et Martin. Ils vont se rendre d’ici la fin de l’année 2015 en Amérique du Sud et partir en immersion dans le Parc National Noel Kempff Mercado, au coeur de la forêt amazonienne de Bolivie. Leur but? Partir en expédition pour filmer des images inouïes d’un lieu préservé, afin de faire apparaître à l’écran une partie du monde qui n’a jamais été filmée auparavant, et d’en laisser une trace dans le patrimoine cinématographique Suisse.

Cedrik est directeur artistique à l’elixir sàrl, photographe et producteur du projet Objectif Sauvage.
Josh est responsable de post production à Actuafilms, réalisateur et passionné de montage vidéo.
Martin est fondateur de Cameraman.com et Wildlifephotography.com, réalisateur et passionné de caméra.

Toutes les infos se trouvent sur leur site web : www.objectifsauvage.ch

Avant de passer à l’entretien, je vous propose de regarder la bande-annonce pour leur page We Make It. Nous parlerons ensuite de leurs motivations, du lieu choisi, de la structure de leur film, mais aussi de leur visions concernant ce que le projet représente.

Propos recueillis par Mark Kuzmanic.

CS : Cedrik Strahm
JP : Josh Preiswerk
MU : Martin Ureta
MK : Mark Kuzmanic

MK – En regardant votre bande-annonce, il est clair que chacun d’entre vous possède une passion pour l’image ainsi que pour la faune et la flore. Qu’a-t-il fallu pour que vous trois vous décidiez à vous lancer dans ce projet maintenant, ensemble? Y avait-il un élément déclencheur ou était-ce un processus graduel qui vous a encouragé?

CS – En vérité, je crois que l’envie de travailler ensemble sur un projet personnel nous est venue dès notre première collaboration professionnelle. L’alchimie s’est immédiatement créée entre nous. Tout le monde a naturellement pris sa place et ses marques au sein de notre team. Et ce sans véritable hiérarchie, c’était un formidable travail d’équipe. Nous étions non seulement efficaces, mais y avons pris un plaisir fou. Et ça… je sais par expérience que c’est très rare. Il fallait donc absolument exploiter ce potentiel créatif et le mettre au service d’un projet qui pourrait nous permettre de nous épanouir complètement. C’est quelque chose qu’on a immédiatement évoqué.

Relativement rapidement, j’ai eu quelques idées qui m’ont traversé l’esprit. J’attendais juste de tomber sur la bonne opportunité, sur la bonne occasion de leur proposer un véritable défi. Et c’en est un de taille. Alors dans un premier temps, il a fallu les convaincre que nous sommes à la fois suffisamment capables mais également assez fous pour tenter de mettre sur pied ce type de documentaire, sans l’aide d’un gros studio ou d’une chaine de télévision. Une fois les doutes levés, nous n’avons jamais regardé en arrière. Globalement, tout ceci s’est passé rapidement entre l’embryon du projet et la mise en marche des opérations. C’est une histoire de semaines. Aujourd’hui, cela fait 18 mois que nous travaillons sur le projet et les choses deviennent réellement concrètes. C’est très gratifiant et très excitant en même temps…

JP – Cédrik a vraiment été le Papa fondateur et celui qui a lancé ce projet, il a réussi à nous regrouper pour tourner une pub et c’est la que la magie a opéré. Dès lors on savait qu’on pouvait collaborer sur un petit projet… mais un gros? là est la question…

MK – Le lieu choisi, le Parc national Noel Kempff Mercado, se situe dans l’Amazonie bolivienne et n’a pas été visité depuis des dizaines d’années par l’homme. Quelle est l’ampleur de l’organisation nécessaire avant votre arrivée sur place pour « préparer » le terrain? Votre processus de préparation, physique et mentale, sera sans doute plus long que votre temps sur place. Tout ce travail sera-t-il documenté et/ou filmé? Pourrez-vous compter sur l’aide de quelqu’un lorsque vous serez en immersion?

CS – Alors je tiens à préciser que le Parc en soi est accessible au public et qu’il a déjà été filmé à plusieurs reprises. Notre objectif est d’atteindre les rives de la lagune Chaplin. Un lac autour duquel la dernière activité humaine remonterait à une quinzaine d’années. Et c’est bien de cette zone précise dont il n’existe absolument aucune image ou quelques photos extrêmement rares. Voilà, ça, c’était pour la petite précision technique.

Maintenant en ce qui concerne l’organisation, la logistique et ce genre de choses et bien, c’est près de 18 mois d’efforts, comme mentionné ci dessus, pour mettre en place les éléments nécessaires à la concrétisation et le bon déroulement des opérations. Bien entendu, nous avons un partenaire logistique local. Une agence basée à Santa Cruz qui offre l’accès au Parc aux personnes désireuses d’y pénétrer. Leur expertise nous est bien entendu très précieuse et leur savoir-faire indispensable. Durant l’expédition, nous serons accompagnés par une équipe constituée par le responsable du projet en Bolivie et qui comprend, des porteurs, cuisiniers, ainsi qu’un guide terrain à même de mener à bien une expédition de cette envergure. Il faut bien comprendre qu’au niveau logistique, c’est du très gros ouvrage. Vu que nous sommes complètement indépendants, et que par conséquent, notre budget reste très modeste, c’était un véritable défi de pouvoir poser les fondements logistiques nécessaires à l’accomplissement de notre projet.

MU – Au niveau de notre préparation physique et psychique et bien j’ai envie de dire que cela fait 30 ans que nous nous préparons! Bien entendu il y a une phase de préparation physique pour un défi d’un tel niveau. Maintenant mon expérience et celle de Cedrik dans ce genre de voyage en milieu sauvage nous ont appris, c’est avant tout dans la tête que tout se passe. Nous allons être confrontés à des difficultés, c’est certain, mais le défi physique n’est pas sensé être insurmontable, même pour des gars comme nous qui n’avons pas forcément une caisse physique irréprochable. Ce n’est pas l’ascension de l’Everest que nous tentons, encore une fois, le véritable défi se trouve ailleurs. Ca ne sera pas une partie de plaisir, mais je n’ai aucune inquiétude à ce niveau là. Non, c’est vraiment dans la tête que ça va se jouer et ça, et bien, c’est très difficile de s’y entrainer. Tout ce que nous pouvons faire, c’est nous préparer à devoir compter les uns sur les autres afin de surmonter les différentes difficultés que nous allons rencontrer.

Le travail en amont est et sera bien entendu filmé et archivé, mais aujourd’hui, il est encore trop tôt pour révéler si tout ceci figurera dans le documentaire définitif.

« Notre objectif est d’atteindre les rives de la lagune Chaplin. Un lac autour duquel la dernière activité humaine remonterait à une quinzaine d’années. Et c’est bien de cette zone précise dont il n’existe absolument aucune image ou quelques photos extrêmement rares. »

MK – Qu’est-ce qui différentie Objectif Sauvage des autres documentaires à propos de la nature?

CS – Et bien c’est une très bonne question. Concrètement, il ne faut pas vous attendre à voir 80 minutes d’images d’animaux à couper le souffle. Pour cela, il y a les monstres, tels que les films de la BBC par exemple, qui le font infiniment mieux que nous.

En revanche ces docus contemplatifs ne montrent jamais l’envers du décor, ou si peu, dans les trop rares « making of » entre autres. Ce qui nous intéresse, c’est de montrer aux gens ce que cela représente de réaliser une expédition de ce genre. Pour cela, nous allons mettre la caméra au centre de l’intimité de l’équipe. Nous allons confronter nos découvertes, nos craintes, nos joies à l’écran. Et tout ceci sera inscrit dans l’esthétique globale des plans contemplatifs que nous serons en mesure de ramener dans les différents environnements du Parc. J’imagine que les gens pourront s’identifier facilement aux protagonistes et se projeter au plus près de l’équipe. L’immersion sera renforcée. Ce que nous souhaitons par dessus tout, c’est que les spectateurs aient l’impression de vivre le voyage de l’intérieur Et ce n’est pas vraiment le cas lorsque tu regardes les grosses productions du genre.

JP – Notre but n’est clairement pas de vendre un documentaire basé uniquement sur la nature, comme l’a dit Cédrik. Nous souhaitons surtout montrer qu’il est possible de réaliser une aventure de type « doc nature » en petit comité, avec une bonne couche de motivation. Les docus nature sont trop orienté… nature justement, ils sont plutôt sérieux et bourrés d’informations utiles. J’aime bien ces docus ceci dit, mais nous voulons aller plus loin que le docu « typique ». On est jeune, on est barré et on va faire un film qui le sera aussi. J’ai envie que les gens décollent de leurs fauteuils, choqués par ce qu’on ose montrer et par la manière dont nous allons raconter notre histoire. Evidemment, tout cela dépend également de que nous allons capturer en Bolivie, mais je pense que nous allons réussir à créer un produit unique, qu’il sera difficile de catégoriser, car ni un docu, ni une télé-réalité.

« Nous allons mettre la caméra au centre de l’intimité de l’équipe. Nous allons confronter nos découvertes, nos craintes, nos joies à l’écran. »

MK – Est-ce prévu de réaliser une suite si le projet est un succès? Peut-être dans un autre endroit de la planète?

MU – Il nous arrive parfois de l’évoquer. Mais une chose après l’autre… Nous allons déjà concrétiser ce premier projet puis nous penserons à la suite. C’est un tel investissement en termes de temps et d’énergie qu’il est impossible d’affirmer aujourd’hui si il y aura une suite. Ce qui est certain, c’est que notre soif créative ne risque pas de s’éroder de sitôt. Il y aura très certainement d’autres projets par la suite. Mais impossible de dire si cela sera la suite d’Objectif Sauvage ou si il s’agira de quelque chose de différent.

JP – Je pense qu’après avoir terminé le montage et écouté Martin pleurnicher pendant des heures, je ne voudrais plus jamais les revoir! Je plaisante en disant ça, bien entendu. Il est clair que si, des mois plus tard, nous tremblons encore en revoyant le film, on va clairement vouloir retenter l’expérience… mais cette fois, complètement nus et avec nos copines, qui sait ? (rires)

« Je pense que nous allons réussir à créer un produit unique, qu’il sera difficile de catégoriser, car ni un docu, ni une télé-réalité. »

MK – Dans un scénario idéal, quel serait le moment que vous espérez vivre et capturer par dessus tout lors de cette aventure ? Quelle est, à l’inverse, votre plus grande appréhension si vous en avez une?

CS –  Une autre chose que j’ai appris durant mes voyages précédents, c’est d’essayer de ne pas avoir d’attentes trop élevées concernant les rencontres avec la faune sauvage. Ce qui rend ce genre d’expédition intéressante c’est qu’il n’y a pas de règles. Je sais que les spectateurs ont des attentes assez élevées à ce niveau. De nos jours, on parvient même à ramener des images filmées de la fosse des Mariannes par exemple. Cela devient très difficile de surprendre et de contenter à ce niveau. Maintenant en ce qui me concerne, je peux vivre des moments magnifiques en observant un simple oiseau sur une branche, un daim qui se nourrit dans une rivière… même si j’adorerais par dessus tout pouvoir me retrouver face à un jaguar, il faut savoir raison garder et faire preuve d’humilité. Si il suffisait de se promener dans la jungle pour voir une panthère noire, tout le monde le ferait et il n’y aurait plus de magie. Ainsi et en ce qui concerne la vie sauvage, mes attentes sont très modestes.

En revanche nous serons très exigeants et consciencieux envers nous-mêmes lorsqu’il s’agira de les montrer à l’écran. Je pense que les gens aussi peuvent s’émerveiller d’un simple oiseau sur une branche si il est capturé de la bonne manière, sous le bon angle, avec la bonne lumière et dans un contexte qui le sublime. Et je sais que la patience a toujours fini par récompenser mes efforts en termes de surprises et de rencontres. Par exemple, je reviens d’un périple au Japon, sur l’Île de Hokkaido, où j’avais pour but de photographier des ours. C’est littéralement lors de ma dernière opportunité que j’ai finalement eu la chance de les croiser. Je suis même tombé sur un groupe de grues à couronne rouge, une espèce menacée et relativement difficile à observer en été, sur mon chemin pour l’aéroport, alors que j’allais prendre l’avion pour rentrer. Je suis donc conscient que les meilleures opportunités peuvent arriver jusqu’à la dernière seconde.

Ensuite, en ce qui concerne les moments que je souhaiterais capturer par dessus tout et bien il s’agit de ceux qui seront en mesure de provoquer une émotion chez le spectateur. Si quelqu’un sort de la projection et me disant que nous les avons fait voyager, voire un peu rêver, ce sera le comble de mon bonheur. Et je pense que cela peut passer par une multitude de situations, allant du simple plan contemplatif, à l’introspection personnelle d’un membre de l’équipe, ou par la tension d’un regard plein de détresse et de doute dans un moment difficile. Je pense vraiment que tout est sujet à l’émotion si le contexte s’y prête. C’est ça que nous souhaitons parvenir à atteindre en terme de narration et d’esthétique.

« J’ai infiniment plus peur de l’être humain que de la vie sauvage. »

Concernant les craintes et bien pour être honnête il n’y en a pas vraiment. Certes, les enjeux sont assez importants, la responsabilité est grande. C’est notre premier projet du genre et cela pourra conditionner la suite de nos carrières de cinéastes. Néanmoins, j’ai pleinement confiance en nos moyens. Nous avons la chance de pouvoir faire ce que nous aimons et je pense que c’est le plus important. L’échec n’existe qu’à condition de ne pas se faire plaisir et ça, c’est tout simplement impossible. Même si ce sera parfois dur, que nous rencontrons des difficultés, je suis convaincu que nous allons prendre un plaisir immense à tenter de mener à bien cette mission. Du coup, je ne suis pas inquiet. Dans notre entourage, les plus grosses craintes concernent la sécurité et l’intégrité physique de chacun.

Il est vrai que l’Amazonie peut représenter une véritable menace si nous ne prenons pas garde. Mais là non plus, je n’ai pas de craintes particulière. Je suis convaincu qu’il ne va rien arriver dans la mesure ou nous partons nous isoler du plus grand prédateur de la planète… j’ai infiniment plus peur de l’être humain que de la vie sauvage, en fait. Il faut que les gens comprennent que les risques sont nettement plus élevés de se faire renverser par un véhicule ou de subir les assauts d’un déséquilibré que de se faire dévorer par un ours au Japon ou mordre par un serpent en Amazonie. Nous diabolisons beaucoup les créatures qui nous effraient et c’est essentiellement alimenté par des récits affreux d’un autre temps. Et puis il est vrai que ce qu’on ne connait pas bien nous fait peur. Ces craintes sont souvent motivées par l’ignorance des gens envers ces animaux. J’aimerais également que ce message apparaisse dans le film. Que les gens comprennent que leurs craintes sont souvent absurdes et qu’il est envisageable d’aller au fin fond de la jungle sans se faire happer par un jaguar féroce tapi dans l’ombre.

MU – Pour moi, j’aimerais voir Cédrik en train de perdre les pédales! Ce type est une montagne de Zen et j’aimerais vraiment le voir exploser à fond! (rires)

« Si quelqu’un sort de la projection et me disant que nous les avons fait voyager, voire un peu rêver, ce sera le comble de mon bonheur. »

MK – Vous mentionnez que vous aimeriez transmettre l’envie de voyager aux personnes qui verront le film une fois terminé. Qu’évoquent pour vous les termes et les différences entre « voyage », « aventure » et « expédition »? Comment décrirez-vous votre projet?

CS – Ça va sans doute sembler très cliché, mais je pense que le voyage commence dès le moment ou l’on sort de chez soi. Il y a moyen de vivre l’aventure sur le trajet pour le travail c’est juste une question de point de vue. On peut s’émerveiller sur tellement de choses lorsque l’on prend le temps de les regarder, simplement. Particulièrement en Suisse, un pays absolument magnifique. On réalise la beauté du lieu dans lequel on vit lorsqu’on commence à voyager un peu autour du monde. C’est chaque fois un tel plaisir que de revenir sur la Riviera.

Les termes dont vous parlez sont tous des synonymes pour moi, je ne fais pas de différence. Un voyage est une aventure, c’est une expédition en soi. L’aventure permet le voyage de l’esprit si ce n’est pas au niveau physique, bref tout ceci va ensemble.

Je pense que notre projet exprime une manière de voyager, une façon de concevoir l’aventure. Elle ne convient bien entendu pas à tout le monde, mais l’essentiel n’est pas là. Encore une fois, il ne s’agit pas de dire aux gens: « vous pouvez partir dans la jungle avec trois fois rien », car c’est faux. C’est un voyage qui nécessite de se préparer en conséquence et qui demande d’être prêt à se confronter à ce type d’environnement. Non, notre souhait est de pousser les gens à envisager le voyage sous un autre angle. Bien entendu sans forcément aller au bout du monde, mais en prenant les choses en main et en se convaincant qu’ils peuvent le faire, qu’ils peuvent aller à la rencontre de la nature et échapper pendant quelques temps à notre mode de vie citadin. J’avoue que de voir tous ces gens s’entasser dans des hôtels ou dans des clubs à formule « all inclusive » me fait beaucoup de peine, même si je peux comprendre la volonté. Je persiste à croire que la manière est inappropriée et qu’il y a d’autres façons d’envisager le voyage. Pour moi, le voyage c’est s’échapper, s’évader et se mettre dans ces hôtels, c’est tout le contraire. Voilà ce que nous aimerions transmettre à travers notre film.

MK – Pour moi, Objectif Sauvage mérite certainement une mention dans les œuvres culturelles de la région. Pouvez-vous me donner votre avis sur l’importance du cinéma et du genre documentaire dans le patrimoine d’un pays ou d’une région comme la Suisse Romande ?

MU – Comme dans la majorité des scènes créatives artistiques, il y a énormément de qualité et de talent chez nous. Le problème est toujours le même. C’est tant le manque de moyens que la minuscule visibilité qui font que nous semblons quasi inexistants en rapport à nos voisins français ou aux pays anglo-saxons. Mais la qualité existe bel et bien. Nous avons un département à la confédération qui subventionne certains projets et ça c’est tout simplement génial. Hormis cela, c’est particulièrement difficile d’obtenir du financement et c’est vraiment dommage car je suis convaincu qu’un nombre important de projets sont morts dans l’oeuf par faute de moyens. C’est plus une remarque sur notre société en général que sur la Suisse Romande, mais quand tu compares les budgets alloués aux moyens militaires à ceux octroyés à l’éducation ou à la culture, par exemple, tu te dis qu’il y a un sacré soucis. Alors que c’est par la connaissance et le savoir qu’on pourrait sans doute éviter bien des conflits, cet état de fait semble particulièrement absurde. J’imagine que les personnes en charge des dossiers n’ont pas forcément d’intérêts à voir les choses évoluer, mais ça, c’est une autre histoire…

JP – Nous concernant, c’est également l’un des messages indirects que nous aimerions transmettre avec Objectif Sauvage et au passage, une petite fierté: nous sommes complètement indépendants. Le financement s’est intégralement fait par des fonds privés, et c’est à la force du poignet, si je puis me permettre, que nous avons monté le projet depuis le début. C’est non seulement un petit pied de nez au système, ça nous permet surtout de garder le contrôle absolu au niveau artistique, mais cela peut également servir d’exemple pour les futurs petites productions. Cela prouve qu’il est possible, même sans aides sélectives ou l’apport de producteurs chevronnés, de mettre sur pied un projet cinématographique d’envergure en Suisse romande.

MK – Vous avez déjà réussi, avec le crowdfunding, à dépasser vos attentes en termes de financement. Comment allez-vous réinvestir l’excédent budgétaire? Pensez-vous prolonger l’expédition ou acheter du matériel supplémentaire?

CS – Comme je l’ai mentionné plus haut dans l’interview, notre budget est vraiment modeste en rapport aux ambitions du film. Ainsi l’excédant servirait avant tout à couvrir certains coûts que nous pensions devoir assumer en interne… Après, il y a de nombreux moyens de nous donner plus de possibilités au niveau technique durant la phase créative de réalisation du documentaire. Il s’agira d’étudier avec soin le meilleur moyen de répartir ce qu’il resterait du budget. Mais étant donné que nous avons toujours regardé au plus serré, nous n’y avons même jamais vraiment pensé. Les très gros moyens ont toujours été de l’ordre du fantasme. Mais qui sait, avec l’engouement et la générosité incroyable des gens qui ont souhaité nous aider à réaliser notre projet, nous pourrons peut-être envisager de transformer certains fantasmes en une réalité.

Je profite de ces quelques mots pour les remercier tous du fond du coeur, ainsi que l’équipe du webzine Le Billet de nous accorder ces quelques lignes et cette visibilité bienvenue.

JP – Facile, ce sera dépensé pendant. Nous allons avoir besoin de sauvegarder toutes ces images sur des disques portables et résistants. Il va aussi falloir prévoir des housses/sacoches de protections pour tout le matériel de tournage. Au niveau captation du son, il nous manque encore pas mal de choses. Aussi, ce budget nous permettrait d’avoir de meilleurs moyen pour étalonner le film par exemple. Nous pourrions travailler avec un projecteur cinéma de qualité (location) et passer du temps sur les bruitages aussi. La post-production va être colossale, et si nous pouvons travailler avec de l’aide de professionnels, nous devrons bien entendu les défrayer… Mais le plus important est que nous partions et que nous réalisions cette aventure, c’est pour ça que notre budget est minuscule et que nous n’avons pas « peur » de ne pas avoir assez. On fera avec ce que l’on a, et on fera du mieux qu’on pourra. On espère déjà avoir pu montrer de cette bonne volonté via notre trailer!

MK – Merci à vous trois!

Si vous souhaitez faire partie de ce projet passionné, je vous invite à vous rendre sur leur page dédiée où les contributions sont ouvertes jusqu’à vendredi 19 heures (le 22 août) : https://wemakeit.com/projects/objectif-sauvage

De notre côté, il nous reste à saluer l’enthousiasme de cette équipe, et nous nous réjouissons déjà de suivre leur progrès et de voir le projet aboutir!

Josh, Cedrik et Martin
Josh, Cedrik et Martin