VIFFF d’or pour « Willy 1er » | Rencontre avec Marielle Gautier, co-réalisatrice

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Image droits réservés Laura Morales

Du 28 au 30 octobre, s’est déroulée la deuxième édition du Vevey international funny film festival qui a accueilli plus de 2000 spectateurs lors de 18 projections. Parmi ses nombreux invités (Sabrina Ouazani, Gustave Kervern et Benoît Delépine etc.), on y a rencontré Marielle Gautier, co-réalisatrice de Willy 1er, grand gagnant de cette édition. « Co-réalisatrice » car ils sont bien 4 à avoir écrit et réalisé ce long-métrage (avec Ludovic Boukherma, Zoran Boukherma et Hugo P.Thomas).

À peine sortis de l’école de Luc Besson (Ecole de la Cité), les quatre jeunes cinéastes signent le portrait d’une émancipation : Willy a la cinquantaine, il est illettré, vit chez ses parents, et décide de voler de ses propres ailes à la suite du suicide de son frère jumeau. Une comédie tendre, absurde et décalée, portée par Daniel Vannet, qui a lui-même inspiré le personnage de Willy. Les quatre réalisateurs ont réussi à éviter avec brio le misérabilisme et la caricature en déclinant  avec humour et dérision la complexité du personnage de Willy. Marielle Gautier revient sur cette expérience à 8 mains.

Propos recueillis par Milena Pellegrini.

Comment avez-vous rencontré Daniel Vannet?

Mes trois co-réalisateurs voulaient faire un court-métrage de fin d’année qui parlait d’illettrisme, ils ont donc regardé des documentaires pour s’inspirer à l’écriture, pour trouver le personnage. Ils sont tombés sur un documentaire de France 2 qui suivait Daniel dans son apprentissage de l’écriture. Il apprend encore à lire dans une association qui s’appelle « Mots et merveilles ». Ils ont écrit le personnage principal en s’inspirant de lui, mais ils ne pensaient pas le prendre pour jouer et pensaient contacter un acteur professionnel. Après, au moment de devoir choisir l’acteur, ils ont commencé à se dire que ça n’allait pas vraiment dans leur démarche de prendre quelqu’un qui est très familier avec la langue de Molière, qui a fait du théâtre. Ca leur semblait un peu ridicule et ils ont directement contacté Daniel pour tourner dans le court-métrage. À force de parler avec Daniel, on a écrit le scénario de Willy 1er à partir de ses récits et de ses anecdotes.

Comment réalise-t-on un film à 8 mains ?

On ne se partage pas les tâches, on fait tout ensemble, que ce soit au niveau de l’écriture ou de la réalisation. À chaque fois qu’il y a des décisions à prendre, soit on est d’accord tout de suite et on se conforte dans l’idée que c’est la bonne décision, soit on n’est pas tous d’accord et on parle pendant des heures pour trouver des solutions qui conviennent à tout le monde. Tout se passe dans le débat, pour chaque décision.

Vous avez fait le film « avec » Daniel, et pas « sur » Daniel. Comment avez-vous établi cette relation en évitant de tomber dans la moquerie?

Nos intentions étaient claires dès le début et on est restés fidèles à ce que l’on avait envie de faire, c’est-à-dire faire un film à l’image de Daniel. Notre regard sur Daniel dans le film est celui que l’on a dans la vraie vie. Il a un côté très touchant, émouvant, dramatique et en même temps il a beaucoup d’auto-dérision, une légèreté de vivre et il est très drôle. Il nous amuse beaucoup et c’est cela que l’on voulait reproduire dans le film: le ton grave et léger qu’il peut porter en lui. On a décidé de traiter Daniel sans pincettes en le montrant aussi bien dans ses travers que dans ses côtés plus poétiques pour qu’on ne le regarde pas de haut.

Image droits réservés UFO Distribution
Image droits réservés UFO Distribution

Le film commence à avoir beaucoup de retentissement dans les médias. Comment Daniel vit-il cela? Participe-t-il à la tournée du film?

Il se déplace très peu, parce qu’il aime bien être chez lui et il n’aime pas trop voyager. Mais il l’a fait de temps en temps et à chaque fois il est très content. Par rapport au bruit du film, il est ravi. Il a eu plusieurs interviews de journalistes qui sont allés chez lui dans son appartement. Il est content de dire qu’il est acteur et la meilleure période de l’expérience pour lui c’est maintenant.

Plusieurs critiques ont classifié Willy 1er dans le sillage de Bruno Dumont. Est-il un réalisateur qui vous a inspiré?

On ne s’est pas inspirés de l’univers de Bruno Dumont, mais en effet il y a des similitudes. On travaille avec des acteurs non-professionnels et on montre des gens qui appartiennent à la France rurale. Par contre, lors de l’écriture, on n’est pas allés piocher dans les films de Bruno Dumont. On s’est vraiment basés sur les récits de Daniel et ce qu’ils nous inspiraient. C’est un film qu’on a fait sans avoir de références cinématographiques, même si au fond on en a tous.

Vous sortez les quatre de l’école Luc Besson. Comment avez-vous fait votre place dans ce monde du cinéma?

Ca s’est fait très naturellement et rapidement. On a fini notre école il y a deux ans et on a trouvé un producteur qui était très à l’écoute (Pierre-Louis Garnon). C’était son premier film aussi et il était très impliqué. On est tombés sur quelqu’un qui voulait faire le film qu’on avait envie de faire. La sortie de l’école n’était pas trop difficile, car il était là pour porter notre projet.

La composition de la bande-originale est très particulière. Comment avez-vous travaillé dessus?

Il y a toute une partie de la musique qui appartient à l’univers de Daniel avec les chansons de Serge Reggiani. La musique contemporaine et plus pop, qui s’apparente plus à l’univers de Willy 2, a été composée par Hugo (un des réalisateurs) avec un autre créateur qui s’appelle Sofiane Kadi. Ils ont écrit la musique ensemble, mais très rapidement, car c’était en fin de montage et ils avaient une semaine pour faire toute la musique du film.

Pour tes projets futurs, tu envisages de travailler seule ou avec tes trois acolytes?

Le prochain film, je vais le faire toute seule et Hugo aussi. Les jumeaux vont continuer à travailler ensemble forcément. Ce sera un premier film seule, ce n’est pas pareil, mais c’est plutôt excitant.

Bande annonce:

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Diplômée en Etudes du développement international, je rejoins l'équipe du Billet en janvier 2015. Films engagés, indépendants, je suis à la recherche d'un cinéma qui perturbe le sens commun et heurte la banalité. Parallèlement, je travaille sur différentes recherches académiques sur le cinéma et la mémoire ainsi qu'au sein du bureau du festival Cully Jazz.